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>> Politique internationale et enjeux planétaires >> Un monde pacifié >> Repenser l’ONU pour un nouvel équilibre des forces
A lire aussi dans l'Autre Campagne

LIENS UTILES
Quelques sites des associations du mouvement altermondialiste :
Amnesty International
ATTAC
CETIM
FIDH
GREENPEACE
IPAM
Plateforme Dette et plateforme IFI
Comité pour l’annulation de la dette du Tiers Monde (CADTM)

Quelques sites officiels des Nations Unies :
ONU 
OIT
FMI
Banque mondiale
OMC
CNUCED 

LIVRES
Gustave Massiah, « Le mouvement citoyen mondial », Revue Mouvements, 2002.


 
Un autre système de relations internationales
par Gustave Massiah*

 
Le système international construit l’ajustement de chaque société au marché mondial et à sa logique dominante ; il interdit d’autres voies de transformation sociale. La recherche d’alternatives à la transformation de chacune des sociétés implique un autre système international.

Du point de vue géopolitique, la marginalisation des Nations Unies par le G8 et l’OMC, accompagne l’hégémonie états-unienne et l’unilatéralisme. La guerre s’impose. Les zones de conflits augmentent et la population qui y vit approche le milliard. La nature des conflits s’élargit. Les guerres liées au contrôle des ressources et des territoires sont toujours d’actualité, la dimension identitaire des conflits s’accentue alliant ségrégation spatiale et purification dite « ethnique ». Les conflits régionaux et intra-étatiques s’éternisent. La dialectique entremêlée des terrorismes de réseaux et des terrorismes d’Etat fait régresser les droits civils et politiques au nom d’un « choc des civilisations » qui justifie la doctrine de la guerre préventive, du « non-droit » et de la torture, la stratégie des guerres du fort au faible et la surprise de découvrir la capacité des faibles à trouver la vulnérabilité des forts.

La nouvelle gouvernance économique mondiale mise en place par le G5 de Tokyo dès 1979 instaure les fondements du système international, à savoir : la libre circulation généralisée des capitaux dans un contexte de forts déficits publics, le libre échange dans un espace de mise en concurrence mondial, la prééminence des firmes multinationales, l’ajustement au marché mondial dans le cadre du consensus de Washington piloté par le FMI et la Banque mondiale, la régulation du système monétaire assurée par les banques centrales et particulièrement la FED des Etats-Unis. La mise en place de l’OMC avec son Organe de Règlement des Différends vient couronner le cadre institutionnel de la mondialisation libérale. Il assure l’élargissement et la primauté du marché mondial et organise la prééminence du droit des affaires sur les autres aspects du droit international.

Le nouveau système à définir doit prendre en compte trois dimensions essentielles : la construction de la paix et le règlement des conflits ; la réduction des risques écologiques ; le système de relations internationales favorisant la transformation des sociétés dans un sens de liberté et d’égalité, de la lutte contre la pauvreté, les inégalités et les discriminations, de l’amélioration des conditions de vie des peuples. La discussion sur le développement doit tenir compte de deux éléments nouveaux, la critique des plans d’ajustement structurels et de la libéralisation, d’une part, et le débat sur les limites du modèle productiviste confronté au nouveau paradigme écologique, aux limites de l’écosystème et à l’échec de la transformation soviétique, d’autre part. La question du développement n’est pas indépendante de la question du règlement des conflits et de leur prévention. La paix est une condition du développement.

Les Nations Unies sont au centre de ce débat mais elles ne résument pas à elles seules le système international. Il existe d’autres acteurs et d’autres institutions, notamment les accords directs nés de la diplomatie entre Etats, des alliances militaires, des institutions spécialisées, des internationales politiques, des diasporas, des réseaux transnationaux de toute nature. Mais les Nations Unies occupent une situation stratégique, elles sont les seules à détenir une légitimité qui se réfère à un intérêt collectif international commun, qui se veut une étape vers l’intérêt de l’Humanité ; elles remplissent plus ou moins bien la fonction d’une communauté politique nécessaire au fondement du droit international. Et pourtant, l’actuel G8, qui a cherché clairement à se dégager des Nations Unies, en les marginalisant et les subordonnant, est obligé de s’y référer.

L’approche par les droits, par l’égalité d’accès aux droits, dessine la perspective d’un contrat social mondial. Elle renouvelle la conception du développement et les interrogations sur les rapports entre croissance et développement, croissance et redistribution, développement et environnement, développement et démocratie. Dans chaque société et au niveau mondial, la prise de conscience de l’impasse portée par le modèle dominant de la transformation sociale, celui de l’ajustement structurel, progresse. Une orientation se dégage des Forums sociaux mondiaux ; elle revendique l’égalité d’accès aux droits et la garantie de cet accès par les instances publiques. Il est possible de réguler l’économie et les échanges à partir du respect des droits ; des droits civils et politiques autant que des droits économiques, sociaux et culturels.

Pour aller plus loin dans la définition d’une stratégie, proposons une ligne directrice organisée autour de deux impératifs : une nouvelle constitution du monde fondée sur la démocratie mondiale ; un contrat social mondial fondé sur le respect et la garantie des droits, tant civils et politiques, qu’économiques, sociaux et culturels. L’évolution du droit international est aujourd’hui, du point de vue de cette ligne directrice, le lieu stratégique des confrontations. Le droit international ne peut être fondé que sur la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et la Charte des Nations Unies. C’est le point fixe autour duquel construire le système des relations internationales, le point d’appui qui donne sa légitimité aux Nations Unies dans le système mondial.

La ligne directrice de la démocratie mondiale et du contrat social mondial donne une orientation et une perspective de refondation du système international et des Nations Unies. Nous proposons de prendre comme axe stratégique de leur mise en œuvre les mouvements et les luttes pour la démocratisation des relations internationales. Citons en cinq : les luttes et mouvement pour le droit international, pour l’annulation de la dette, pour la fiscalité internationale, pour la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, pour la réforme des institutions financières internationales. Dans chacun de ces mouvements, la référence aux Nations Unies s’impose comme une évidence et chacune de ces luttes définit des propositions de réforme des Nations Unies. L’ensemble de ces mouvements ne convergera pas spontanément vers une démocratie mondiale. C’est en défendant dans chacun de ces mouvements les propositions compatibles avec ces orientations et en les faisant converger que ces luttes seront porteuses d’une refondation du système international.

Appuyée sur les luttes pour la démocratisation, une plate-forme radicale du système international peut être proposée. Elle comprend : la démocratisation du fonctionnement des institutions qui doivent mettre en œuvre la régulation internationale ; la mise en place d’instances d’arbitrage et de recours efficaces ; un système international de plaintes ouvert à la saisine des associations citoyennes ; la priorité dans le système international de la lutte contre l’impunité ; l’intégration effective dans le système direct des Nations Unies des institutions financières et commerciales internationales, FMI, Banque mondiale, Société Financière Internationale et OMC ; une nouvelle architecture pourrait être fondée sur des ensembles régionaux de coopération et un système de représentation régionale au niveau mondial ; l’obligation des accords et pactes internationaux et de toutes les institutions internationales de respecter la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
Gustave Massiah*

* Economiste, président du Centre de recherche et d'information pour le développement - CRID - et membre fondateur d'ATTAC.

Ces propositions ont été développées du CETIM. L’ONU Droits pour tous ou droit du plus fort ? Genève 2004