L'autre campagne L'Autre campagne Michel Herreria
Retour à l'accueil

>> Politiques sociales et économiques >> Nouvelles solidarités sociales >> Introduction : Le Service Public au cœur de la citoyenneté moderne
 
Le Service Public au cœur de la citoyenneté moderne
Introduction
par Bernard Defaix*

 
Les Services Publics sont aujourd’hui confrontés partout à des défis considérables qui ne laissent aucune crédibilité à des stratégies purement défensives de statut-quo et de préservation des acquis. Oui, la résistance à la tentative historique actuelle de démantèlement et d’abandon est absolument nécessaire mais il s’agit aussi de reconquérir des positions, de démocratiser des fonctionnement et de répondre à une explosion de besoins nouveaux et diversifiés.
L’explosion est générée par l’extraordinaire bouleversement des conditions de vie de l’humanité qui, en poursuivant sa révolution industrielle et en ouvrant l’ère de l’informatique, est parvenue, non sans phénomènes proprement insupportables et suicidaires, au stade actuel de la mondialisation des modes de production et d’échanges, accompagnée de la « généralisation » relative de la consommation.
Le système capitaliste, au travers de multiples et parfois terrifiantes contradictions, a conduit cette évolution. Toujours poussé par sa logique profonde d’une recherche d’un taux de profit maximum, il est aujourd’hui, depuis plus de 40 ans, lancé dans l’organisation d’une marchandisation totale des activités humaines et d’une Mondialisation du Commerce des Services, qui tend à soumettre partout ces derniers au « monopole naturel » du Marché, et donc aux règles de la concurrence « libre et non faussée ».
Malgré sa capacité démultipliée par l’hypermédiatisation, d’orienter l’imaginaire social, les représentations et les valeurs, et tout en ne reculant devant rien, y compris les aventures guerrières, il rencontre de fortes résistances et peine à convaincre les opinions des vertus humanistes du Marché, en matière d’égalité, de solidarité et de respect de l’environnement ! Il heurte la conscience collective que tous les êtres humains ont des droits, et la conviction que la Puissance Publique a le devoir de permettre à toutes et à tous de les exercer.

Et pourtant, à l’heure de l’OMC et de la négociation intergouvernementale concernant l’Accord Général sur le Commerce des Services, à l’heure aussi du débat sur le Traité Constitutionnel Européen, l’avenir des Services Publics, largement considérés, y compris dans certains milieux patronaux, comme indispensables à la cohésion sociale et à la satisfaction des besoins essentiels des populations, est pour l’instant, fortement hypothéqué, par la volonté des pouvoirs financiers et des gouvernements des principaux Etats de la planète, USA en tête, de réduire de façon drastique leur rôle social, économique et politique et de peser sur les Collectivités Territoriales, à tous les échelons, pour les inciter à faire sans cesse le choix du Privé ?

Sont visées la déconstruction de la Citoyenneté, et surtout, celle du modèle républicain qui, depuis 1792 et tout au long des luttes sociales du XIXe et du XXe siècles, assigne à l’Etat-Nation le devoir de mettre en œuvre, au nom de la Liberté, de l’Egalité et de la Fraternité, des politiques d’Intérêt Général et de réponses aux besoins grâce à des Biens et des Services Publics garantissant l’accès à des Droits fondamentaux. Ainsi en France, à la Libération, un vaste Secteur Public et une Sécurité Sociale dont la gestion sera confiée aux organisations représentatives des salariés, verront le jour.
Le cœur de la stratégie libérale est donc bien de restreindre au maximum, non pas le pouvoir de l’Etat en terme d’Administration, de Police et d’Armée, mais ses champs d’intervention, et de réussir « une refondation sociale » dans laquelle la déréglementation, la précarité, le contrat individuel d’assurance, l’offre de services vendus par des entreprises privées à un public de clients, dans le cadre de missions de service public, tiennent lieu de solidarité.

Face à cela, il s’agit d’opposer une autre démarche réellement solidaire, fondée d’abord sur la réaffirmation constitutionnelle des Droits fondamentaux : la Santé, l’Education, la Recherche, la Culture, l’Emploi, les Communications, les Transports, l’Energie, l’Eau, l’Alimentation, le Logement, les Services à la Personne (petite enfance, personnes âgées et dépendantes, obsèques, etc.) doivent donc relever de Services Publics protégés de la concurrence, l’Etat restant garant de l’égalité des citoyens dans l’accès aux droits.
L’ampleur et la diversité des besoins actuels nécessite que le dispositif de propriété publique constitué par les Biens Communs et les Services Publics soit développé et amélioré par des mises en synergie, des créations de Pôles publics et par une liaison institutionnelle avec les usagers et les structures de participation, qu’il faut multiplier.
L’enjeu est de pouvoir construire collectivement, au plus près des citoyens, et grâce à des services publics efficaces, des politiques publiques mettant réellement l’activité économique et sociale au service de la qualité de vie, notamment pour les plus démunis et d’opérer ainsi une plus juste redistribution des richesses, en favorisant notamment un aménagement équilibré du Territoire et des politiques de développement local respectueuses de l’environnement.
Comprise ainsi, la problématique des Services Publics concerne bien l’ensemble des habitants du pays ; elle n’est pas du seul ressort de l’Etat et son appropriation sociale par les élu-e-s et les forces politiques, les salarié-e-s et les organisations syndicales, les usager-e-s et les associations, est une condition indispensable de leur qualité.

Elle appelle nécessairement : une profonde réforme fiscale qui, tant au niveau de l’Etat que des Collectivités Territoriales permette de mener des politiques publiques ambitieuses. La mise en cohérence des niveaux pertinents de compétence pour la meilleure gestion démocratique des Services et le principe d’égalité des citoyens dans l’accès aux droits sur tout le territoire ; c’est un élément clé pour une efficacité nouvelle des Services Publics.

L’Europe doit explicitement reconnaître le principe même du Service Public et fabriquer, en améliorant la Charte des Droits fondamentaux, du Droit d’Intérêt Général, clairement distinct de celui régissant l’économie de concurrence libre et non faussée.

L’appropriation sociale exige un énorme travail législatif sur la nécessaire circulation de l’information, sur les modalités de représentation dans les instances de décision, de contrôle et d’évaluation et sur la création significative de droits démocratiques nouveaux en matière de citoyenneté et de statut des élus.

C’est bien pour cette raison que nous affirmons que la modernité est de ce côté-là, dans la perspective de la libération du potentiel énorme de créativité que peut représenter la convergence des Elus, Salariés, Usagers, pour gérer ensemble les Biens et les Services Publics.
Bernard Defaix*

* Membre du collectif de Guéret.



Réaction(s) à cet article
2 Je me reconnais plutot dans cette réaction par Charles
le mardi 20 février 2007 à 11:11
http://www.wikipol.fr/index.php?title=Staline_est_dans_les_d%C3%A9tails [ lire la suite ]
1 Le service social : une mission de service public par Font
le mardi 13 février 2007 à 17:05
Bonjour Bernard.
Tout à fait d'accord avec toi sur les services publics.
Dommage par ailleurs que le service social ne figure pas dans les secteurs concernés par le Manifeste des services publics malgré l'amendement que nous avons fait remonter par le collectif service public de Haute Garonne.

Le social est mis à mal par les directives... [ lire la suite ]