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Les réactions à "Pour une autre relation à l’art et aux populations"par Eric et fazette Autre(s)pARTs (Fazette Bordage, Eric Chevance et Philippe Henry)

1 La culture des candidats! par Muncerus
le mardi 20 février 2007 à 12:12
Dans les années 80 la culture constituait à la fois l'alibi et le "booster" des programmes électoraux et des candidats qui les présentaient. Le "développement culturel" était en vogue, les budgets suivaient. L'action culturelle irriguait le territoire et c'était bien ainsi, du moins jusqu'au moment où la démarche "entrepreneuriale" a progressivement pris le pas sur le militantisme, jusqu'à ce que la technocratie évaluatrice impose l'examen de ratios plus ou moins révélateurs, jusqu'à ce que le marketing fasse irruption dans les esprits, jusqu'à ce que les lobbies du tout commercial imposent leurs vues et méthodes aux "gestionnaires" de la culture.
Mais aujourd'hui, signe des temps, c'est l'environnement et le "développement durable" qui sont porteurs et nul ne songerait à diffuser un programme sans y faire référence, sans y consacrer pages dues et promesses budgétaires convenables. La culture, si l'on en juge d'après les programmes respectifs des candidats à la présidentielle, semble devoir se résigner à la portion congrue qui lui était autrefois dévolue.
Rien de vraiment sérieux à extraire des propositions, pas même chez Ségolène Royal auprès de qui on aurait pu imaginer un Lang plus affairé à élaborer une politique culturelle offensive qu'à pourfendre inutilement une droite par ailleurs assez peu soucieuse des besoins culturels du pays. Le pacte de Ségolène Royal est, pour ce qui concerne la culture, d'une affligeante pauvreté. A noter que, dans la très longue émission de TF1 "J'ai une question à vous poser", la culture n'a été à aucun moment évoquée!
Nicolas Sarkozy ne fait guère preuve de plus de lumières sur le sujet. Tout au plus a-t-il un instant prêté l'oreille aux suggestions de l'habile Xavier Darcos, imaginant un instant fondre en un seul ministère celui de l'éducation et ce qu'il reste de celui de la culture. La crainte du faux pas l'a fait, semble-t-il, abandonner cette idée. Pourtant – et l'idée n'est pas nouvelle, et l'on avait même beaucoup espéré du double ministère jadis occupé par Jack Lang! – il y avait là quelque chose à creuser tant il est vrai que l'hétéronomie de la culture est manifeste et que l'expérimentation de son autonomie a maintenant révélé les limites de l'exercice.
Force est de reconnaître que seul François Bayrou, qui a pris la peine de participer au colloque sur la diffusion culturelle organisé au sénat le 17 février, semble avoir réellement compris les multiples enjeux de la problématique culturelle. Ses dernières interventions forcent pour le moins l'attention. On aura notamment apprécié de l'entendre dire que "la culture n’est pas le simple chapitre d’un programme politique, elle est la composante d’un projet pour une nation: de l’enfant à l’école au citoyen dans la cité" ou que, par exemple, "la transmission et le partage de la culture, c’est oeuvrer aussi à sensibiliser et à accueillir toutes sortes de publics, de penser à des lieux qui ne soient pas tant figés dans des labels mais ouverts sur la cité et aux artistes, porteurs de projets innovants qui encouragent le croisement des disciplines et des genres". Reste que François Bayrou n'a pas fait montre, lorsqu'il était en charge de l'éducation nationale, de la plus grande fermeté pour imposer sa vision dans son département ministériel.
Il reste fort à faire pour définir et promouvoir une politique culturelle digne de ce nom, assurer l'extension du champ culturel à tous les secteurs de l'activité nationale tout en lui conservant sa spécificité, garantir à son exploitation le financement qui puisse lui suffire sans qu'un recours excessif aux fonds privés ou les pratiques du merchandising viennent altérer la nature de ce qui fonde l'intelligence collective.
Sans doute ne sommes-nous pas assez exigeants dans cette période ou même les promesses des candidats sont d'une rare médiocrité!

Muncerus