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Les réactions à "Chronique d’une trahison annoncée"par Frédéric Lordon

4 "identité nationale", l'oxymore en trop par samuel
le jeudi 12 avril 2007 à 21:09
Votre article est excellent, sauf qu'il contient un élément... tout à fait scandaleux : l'exemple que vous retenez d'une "forme non nationaliste de l’identité nationale" est tout à la fois décalé, même un des pires choix imaginables, et … une parfaite insulte à la démocratie !

Soyons honnêtes, mon cher Frédéric : dans cette version longue d’un message autrement plus mûri, juste et percutant, vous avez simplement eu la légèreté, voulant éditorialiser sur un sujet qui n’est pas dans vos cordes, et même dans celles ne personne, d’entrer dans un piège à cons par excellence, mais en plus, d’aller jusqu’à le faire en employant comme argument un geste politique que vous condamnez-vous mêmes ! Vous avez assurément plus d’empathie pour nos amis les Allemands, je veux dire les citoyens allemands, et une idée sûrement bien plus haute de ce qu’est la nation, pour aller ainsi tomber dans tant de grossièretés réunies... Peu m’importe de vous chatouiller, je tiens à profiter de l’occasion pour remettre de l’ordre (de la justice) dans ce guêpier, tout simplement parce qu’il y a là, réunies, trop de choses essentielles.

« qu’il soit possible de concevoir des formes non nationalistes de l’identité nationale, et aussi de les défendre quand elles menacent d’être mises à mal par des contraintes extérieures, ce sont les Allemands qui nous en ont donné l’illustration la plus spectaculaire »
C’est vrai, mais vous vous trompez assurément d’exemple, dans l’attribution de la palme : l’exemple le plus spectaculaire que donna l'Etat Allemand de la conception d'une identité nationale sans nationalisme fut sans le moindre doute celui de la propagande nazie. Car le national-socialisme était encore bien moins "national" que "socialiste". Comme chacun ou presque l’a compris… trop tard : il faut donc comprendre que justement, la nation allemande, elle, reçut cette propagande comme une forme éminement nationaliste... au grand "bonheur" de "l'Etat" (de ses maîtres).
Or - passons sur la palme - votre exemple, tout autant que celui-ci, mélange complètement l’Etat et la nation. Erreur funeste, et amalgame odieux pour tout démocrate, et même simplement pour tout adversaire de toute forme de tyrannie.

Ajouté à cela que les affaires monétaires, dans le contexte de la tyrannie - totalitaire - nouvelle ont un rang égal, c'est à dire premier, à celui qu'occupaient les affaires de "race" dans le mouvement totalitaire nazi, décidément, vous avez touché le gros lot, mon cher.

« c’était à l’occasion de la négociation du traité de Maastricht ».
Comme chacun sait, la négociation de traités est l’affaire exclusive de représentants d’Etats. Lesquels n’ont évidemment pas à toucher eux-mêmes aux fondements les plus essentiels de la démocratie, donc à ce qui heurte de plein fouet la souveraineté du peuple. Et, Français plus encore qu’Allemands, sont bien placés, surtout depuis deux ans, pour comprendre ce que coûte l’oxymore "traité constitutionnel" érigé en cœur de propagande d’une tentative monumentale de coup d’Etat. Pas besoin de connaître le nom de l’auteur (ou de tant d’autres), nous sont trop bien (re)venus à l’esprit ces termes de Mussolini (après Hitler et Staline, désolé si les références arrivent ainsi, ce n’est qu’un symptôme de l’importance de notre sujet) : « Le qualificatif de souverain appliqué aux peuples est une tragique plaisanterie.» Ou ceux du marquis de Rivarol : « Il y a deux vérités qu'il ne faut jamais séparer en ce monde : que la souveraineté réside dans le peuple, que le peuple ne doit jamais l'exercer ».
Et ces Français et ces Allemands, d'une manière ou d'une autre, ils ont une conscience assez aïgu de l'importance, dans cette sale affaire, des choix sur le régime monétaire (les conséquences qu'ils en perçoivent).

« reconquérir la souveraineté collective sur la gestion de la monnaie est un impératif incontestable ».

Je ne pense trahir personne en rappelant ici, de mémoire, vos propres propos. C'est que nous avons - le saviez-vous ? - un ami commun que je ne nommerai pas ici, et que, par son intermédiaire, nous avons eu deux échanges, dont un très indirect, précisément au sujet de la monnaie. Au-delà de vagues allusions à certain charlatanisme bien intentionné que vous m’attribuez (sans le savoir), proférés, au passage, sans la moindre trace d’argumentation ni technique ni même relevant du débat contradictoire (ce qui ne vous honore pas, songez à l’attitude générale en matière d’éducation populaire de notre ami commun – passons, c’est juste une relance, au passage) vous confirmez par-là que nous sommes parfaitement d’accord sur l’essentiel.

« par exemple […] l’invraisemblable sortie de la candidate socialiste sur l’identité nationale, qui dit tout ce qu’on ne voudrait pas et rien de ce qu’on voudrait. »

Comment, dès lors, avez-vous pu retenir cet exemple-là ? C’est surréaliste ! Je vais vous le dire, moi, pourquoi : si vous en êtes arrivé à commettre cette énorme bourde, en marge de ce magnifique propos, tout en écrivant que des exemples, en l’espèce, il en existait au moins un (« penser l’identité nationale sous une modalité autre que cocardière n’est pas un exercice tout à fait impossible »)… et que c’est par « carence intellectuelle » que ce parti dégénéré (le mien - je vous l'accorde, d'ailleurs vous m'aurez aidé dans mon choix de vote) en est arrivé là, c’est tout simplement parce qu’il n’existe AUCUN exemple : « identité nationale » est un oxymore, point… fermer les guillemets et la parenthèse.
3 l'ordre moral libéral-sécuritaire de la droite-gauche par Igor Babou
le samedi 07 avril 2007 à 09:09
Merci pour ce texte. Je ne sais pas s'il est utile d'en rajouter une couche, mais si comme le rappelait Bourdieu dans une interview, ce qui fait fondamentalement la différence entre la droite et la gauche c'est le rapport à l'ordre, il n'est alors pas tout à fait inutile de rappeler que les lois dites "LSQ" (lois sécurité quotidienne) qui ne sont rien moins que des lois sécuritaires portant atteinte à bon nombre de libertés individuelles et publiques ont été signées par L. Jospin. L'un des derniers actes "politiques" (le 7 mai 2002) de L. Jospin a d'ailleurs été la signature de l'amendement "Mariani-Sarkozy", un nouvel amendement sécuritaire à la LSQ concernant les free-parties, et rabattant sur les dimensions juridiques et sécuritaires ce qui aurait du être pensé en termes de culture. Le retour à l'ordre moral, incarné aujourd'hui par S. Royal autant que par les droites sarkozystes ou lepenistes, n'est donc pas une nouveauté pour la gauche de gouvernement.

Enfin, dans un autre registre, celui de l'enseignement supérieur, on peut également rappeler que le protocole de Bologne, qui ouvre la voie de la privatisation de l'université dans la perspective de l'AGCS, a été largement soutenu par J. Lang qui, me semble-t-il, a même devancé les exigences de l'OMC qui n'en demandait pas tant.

Cordialement
2 Refus d'un capitalisme archaïque par Jean-Marie Viguié
le mercredi 04 avril 2007 à 15:03
Pour l'essentiel, nous partageons les analyses de Frédéric Lordon.
Deux remarques seulement.
1) L'idée de l'Etat social ou d'un modèle social qui fut aussi un pacte social comme dépassement positif de l'identité nationale est très forte. Seulement, il n'y a pas, nous semble-t-il, d'Etat social en soi. Il n'y a Etat social que s'il y a plein emploi et donc possibilité d'une redistribution véritablement sociale (allocations familiales, bourses, etc.) ou organisée sur la base du revenu et non une redistribution sur la base de catégories "asociales" (les jeunes, les vieux, …) ou un saupoudrage (clientéliste ?) corrigeant à la marge les effets d'un capitalisme imbécile et donc parfaitement homogène avec lui.
2) Depuis plus de deux décennies, la gauche de gouvernement participe activement à la mise en place d'un capitalisme archaïque, et à chaque élection, elle nous joue le coup de l' "urgence" et réussit à imposer le diktat du "vote utile". Ce faisant, elle est doublement gagnante. Elle n'a pas à assumer directement les conséquences politiques de sa participation aux affaires. Par ailleurs, indépendamment de ses propres fragilités, l'autre gauche ne peut pas apparaître comme un courant politique significatif. On ne voit pas très bien pourquoi en de telles circonstances, la gauche de gouvernement quitterait le chemin qu'elle a emprunté depuis plus de vingt ans en accumulant les "trahisons".

Le capitalisme archaïque prédominant aujourd'hui a sa propre logique. La gauche de gouvernement qui l'a acceptée, ne peut pas avoir de politique radicalement différente de celle de la droite, ni en matière économique, ni en matière de répression quand les contradictions sociales iront en s'accentuant. Il n'y a pas de version "soft" ou "socialiste" de ce capitalisme imbécile. La seule alternative à sa probable aggravation est son abandon.
Ici, nous ne voyons pas très bien comment il demeure possible de voter au premier ou … au second tour pour la candidate du PS. Sorry !
1 Ce qu'il fallait dire par JL
le mercredi 04 avril 2007 à 13:01
L'article qu'on attendait, pour dire tout ce qu'on voulait dire sans savoir le dire. Merci.