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Les réactions à "Supprimer l’élection du Président de la République au suffrage universel"par Thomas Heams

5 une limite : que devient le pouvoir de dissolution? par Pierre
le mardi 06 mars 2007 à 17:05
Cette proposition me parait excellente mais il me semble que c'est en allant un peu plus loin dans le résonnement qu'un problème se pose. La définition du régime parlementaire est la dépendance organique ce qui signifie qu'il y a responsabilité du gouvernement devant l'assemblée Nationale, mais aussi une capacité de l'exécutif à renverser l'assemblée. Hors c'est là qu'il me semble que se pose une limite à la suppression de l'élection du Président de la République au suffrage universelle. D'où le Président tiendra-t-il sa légitimité pour pouvoir renverser l'assemblée nationale ? Si on enlève cette possibilité à une tête de l'exécutif, le risque est grand de retomber dans les travers de la 3ème république.
4 Que faire? par Roger Monjo
le vendredi 02 mars 2007 à 09:09
Le choc de 2002, c'est-à-dire, en réalité, moins la menace représentée par la présence de l'extrême-droite au second tour (car J-M Le Pen ne sera jamais président de la République et n'a jamais eu aucune chance de l'être) que le score plébiscitaire et bien peu républicain de J. Chirac (même De Gaulle n'était jamais parvenu à de tels sommets) qui venait juste après son résultat calamiteux du premier tour, a fait apparaître l'urgence d'un rafraîchissement, au minimum, de nos institutions politiques. Pourtant rien n'a été fait dans ce sens. Et nous voici repartis pour un tour, avec, cette fois-ci, non pas un mais deux "troisième homme". De telle sorte que la situation politique devient de plus en plus imprévisible et aventureuse.
Aussi, si l'on est chaque jour un peu plus convaincu (ce qui est mon cas), au vu du déroulement de la campagne officielle, que l'urgence politique actuelle est institutionnelle (rompre avec l'élection du président au suffrage universel et, plus globalement, avec la Vème République) mais si l'on est, dans le même temps, obligé de constater qu'aucun des candidat en lice ne met cette urgence au coeur de ses propositions, que faire sinon s'abstenir ou voter blanc ou nul?

3 Réponse de l'auteur
Réponses à vos réactions par Thomas Heams
le mardi 20 février 2007 à 16:04
Merci à Patrick May et à Maxime pour leur réactions.

A propos de la proposition de Patrick May sur le renforcement de la fonction présidentielle.
Je suis, et c'est aussi la position de la C6R, opposé à cette option alternative. Mais cela est aussi l'occasion de rappeler que ce n'est pas parce que nous proposons l'approche primoministérielle que nous sommes contre toute forme de leadership, bien évidemment. Que l'exécutif ait à sa tête un représentant fortement identifié, disposant d'une personnalité reconnue qui lui permette de se faire entendre dans les sommets internationaux, les grandes négociations commerciales, c'est, bien sûr une nécessité. Le régime primoministériel n'empêche absolument pas l'émergence de telles personnalités. Et d'ailleurs, la passion qu'ont les Français pour les « grands hommes » (qu'on l'aime ou qu'on la réprouve), continuera pour longtemps à y contribuer. Vous prenez l'exemple de la guerre en Irak, mais convenez que l'Allemagne s'y est aussi opposée, sans avoir pour cela besoin d'un « président » fort. Schröder a tout autant fait l'affaire en l'espèce.
Je pense que nous nous retrouvons sur la nécessité d'une clarification à la tête de l'effectif. Mais je demeure attaché a une évolution primoministerielle, où le chef de l'éxécutif tient sa légitimité d'une élection legislative, collective, et qui rend des comptes devant le Parlement.
Et par ailleurs, je pense que nous serons d'accord sur le fait qu'un chef de l'exécutif ne tient pas tant sa « force » du mode d'élection qui l'a désigné, que de la confiance que les citoyens portent dans le système. Pour moi, cette confiance, actuellement en crise, ne passera que par la recherche acharnée de tous les moyens qui rendront les gouvernants res-pon-sables. Choisir un premier ministre comme tête de l'exécutif est une des manières de répondre à cet objectif.

A propos de l'intervention de Maxime.

Je pense que convoquer le « sens de l'histoire » pour charpenter une argumentation est souvent le principe à beaucoup de conservatisme. Je ne nie pas, bien sûr, qu'un système doive être en adéquation avec les traditions politiques d'un peuple pour espérer trouver une forme de durée. Cependant, à trop jouer cette partition, on peut accréditer tous les immobilismes. Et au passage, édulcorer les choses, puisque les conditions d'apparitions de la Vème république, plus que la synthèse que vous évoquez, sont plutôt du ressort d'un quasi coup d'Etat ( le terme est de Michel Winock) dans le cours de la guerre d'Algérie. Le génie de de Gaulle ayant été de le faire avaliser par le peuple, exaspéré par le desordre institutionnel de la IVème République. Si les peuples ont une histoire, ils ont aussi le droit, et même le devoir, régulièrement, de regarder de l'avant et, parfois de faire le point sur le contenu du pacte fondamental qui lie les citoyens : leur Constitution.
Quant à savoir le contenu du régime parlementaire que nous souhaitons, il faudrait évidemment plus que le cadre étroit de la proposition que vous venez de commenter. Nous ne proposons évidemment pas un retour à la IVème République, que nous ne fétichisons pas, c'est absolument clair. Si je devais résumer l'esprit de nos propositions ( que vous pouvez retrouver intégralement sur le site www.c6r.org ), nous proposons de garder les acquis de la stabilité de la Vème, tout en revalorisant le rôle du Parlement, notoirement et scandaleusement méprisé dans les institutions actuelles. Que cela suppose une nouvelle architecture administrative, oui, pourquoi pas ? La question des échelons peut être posée, à l'heure de l'intégration européenne. L'émergence de l'intercommunalité doit être prise en compte, encouragée, et démocratisée. A ce stade, votre crainte d'archaïsme tombe, me semble-t-il.
Pour le reste, je ne partage pas, c'est le moins que l'on puisse dire, votre opinion hardie sur le fait que le principe de responsabilité se soit dilué en France (indirectement) à cause du refus de ses dirigeants de lui appliquer les potions anglo-saxonnes. Cultiver ce regret, c'est pour le coup, faire preuve d'une relation particulière au « sens de l'histoire » ! Enfin, je maintiens que, bien que populaire, ce que je ne nie pas ( j'ai parfaitement conscience d'être minoritaire avec ma proposition, je l'assume) l'élection présidentielle est, comme les autres, marquée par une abstention sans cesse croissante. Ce qui, à soit seul, est un symptôme.
Enfin, un point d'accord entre nous : rien, dans ce qui nous conduit a proposer des réformes dans le système représentatif ne nous interdit de nous intéresser, en parallèle, à la démocratie participative.

Merci pour vos contributions !
Cordialement
TH
2 Pas convainquant par Maxime
le mercredi 14 février 2007 à 13:01
Trois reproches à cette analyse.

1. La proposition est purement théorique. Elle néglige le contexte historique français dans lequel sont apparues à la fois l’élection du Président au suffrage universel et la constitution de la Ve République : la nécessité d’une synthèse de l’Ancien régime et de la Révolution, qui a enfin réconcilié deux France en lutte depuis 1789. De Gaulle avait le sens de l’histoire ; le rédacteur ne l’a guère : veut-il rouvrir ce gouffre ?
2. La proposition est vague : si l’on revient à un régime parlementaire, quel type de parlementarisme ? La plupart des régimes européens cités, sont des monarchies constitutionnelles, ce qui règle la question de la présidence ; ou des Etats fédéraux ou très décentralisés dans lesquels le Président est le gardien symbolique de l’unité nationale. Il va de soi qu’un retour au parlementarisme devra intégrer une nouvelle architecture administrative, sauf à retomber dans le parlementarisme du XIXe et du début du XXe siècle, totalement dépassé. C’est, par étourderie, l’archaïsme effectif où la proposition, en l’état, nous conduirait.

J’ajoute qu’à un moment où la démocratie représentative doit être complétée par une démocratie directe et participative rendue enfin possible par les techniques de l’information et de la communication, que diront les citoyens, souvent internautes, si on les ramène cent ans en arrière ? Où est l’archaïsme ?

Voilà pour le fond. Dans le détail :
1. La dilution du principe de responsabilité due à la plasticité de la présidence. D’abord, la plasticité est la principale qualité d’une constitution ; c’est notamment parce que les 4 précédentes en manquaient que la France a souffert d’une instabilité constitutionnelle inconnue ailleurs. Ensuite, si le Président et le Premier ministre ont pu se défausser l’un sur l’autre de leurs échecs, c’est parce que depuis 1981 (sauf 1986-1988), la gauche comme la droite ont conduit la même politique, consistant, par idéologie, à refuser d’appliquer les solutions économiques qui, dès la fin des années 70 et le début des années 80, ont tiré les pays anglo-saxons de la crise du début des années 70.
2. L’argument justifiant l’abandon de l’élection au suffrage universel par l’abstention est spécieux : c’est l’élection ou le taux de participation est le plus élevé. L’abstention est générale dans la plupart des démocraties. Les causes : l’essoufflement du système représentatif, qui doit être complété par plus de démocratie directe et participative ; chez beaucoup, aussi, l’idée que le système fonctionne tout seul, illusion consternante.
1 Rééquilibrage des pouvoirs par Patrick May
le mardi 13 février 2007 à 07:07
Votre article souligne avec beaucoup de pertinence la dévaluation de la fonction présidentielle, tantôt rognée par les cohabitations, tantôt adulée par un dauphin.
Il me semble que le Général De Gaulle n'avait pas voulu cela. C'est la faiblesse des marquis qui lui ont succédé qui a amené cette dévaluation.
Alors, revaloriser la fonction primoministérielle, pourquoi pas? Mais pourquoi pas revaloriser la fonction présidentielle? Car c'est bien dans la dévaluation des deux fonctions simultanément que réside le problème.
Le problème ne me paraît donc pas ressortir à la simple forme du scrutin. Comme vous le dites, cette réforme doit s'accompagner d'un train de rééquilibrages institutionnels. On pourrait imaginer de redonner son lustre à la fonction présidentielle. Le quinquénat va dans ce sens.
Pourquoi cette réflexion? Parce qu'il me semble que la fonction primoministérielle forte telle qu'on la voit en Belgique, en Autriche, en Pologne, en Angleterre, en Allemagne, en Israël ou aux Pays-Bas ne résout pas tous les problèmes. La Belgique, par exemple, manque d'une représentation nationale forte, le roi y est plus symbolique qu'autre chose et le premier ministre est forcément ou flamand ou wallon, c'est à dire représentatif à moitié. En réalité, ce système institutionnel promeut finalement une représentation hybride qui réduit le premier ministre à un gestionnaire des affaires courantes, soumis aux modes et aux humeurs de l'électorat.
On pourrait imaginer en revanche, une fonction présidentielle forte, avec contrat entre le chef de l'Etat et le peuple.
Il me semble que l'exemple des trente-cinq heures devrait faire réfléchir. Imposée sous la pression du peuple, cette mesure s'avère catastrophique sur le plan économique, ce qu'un vrai chef d'Etat n'aurait pas dû permettre.
Enfin, le monde a bien changé depuis le Général. Seuls les Français ne s'en sont pas encore aperçu. La bataille économique de demain sera impitoyable, les pays émergeants feront des razzias dans les économies occidentales, les ordinateurs indiens submergeront les marchés. Quelles armes a la France pour lutter dans cette jungle? Les trente-cinq heures? La retraite à quarante-cinq ans?
La France manque de quelqu'un qui la réveille. Vos réflexions vont dans ce sens. Mais ne pêchez pas par démagogie. Le renforcement de la fonction primoministérielle n'est pas une solution miracle et risque de ralentir encore les indispensables réformes devant lesquelles les Français rechignent encore.
Enfin, je rappelle que s'il n'y avait pas eu Chirac, la France serait aujourd'hui en Irak. C'est peut-être la seule chose qu'il a faite, mais il l'a bien faite et c'est sa fonction présidentielle qui lui en a donné les moyens. Quel premier ministre aurait ce pouvoir? Voyez ce qu'ont fait l'Italie, l'Espagne, l'Angleterre dans ces circonstances.
Bien à vous.