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Pour un droit au logement opposable
par Au Logement Droit*

 
Même s’il est reconnu par la jurisprudence comme un droit « à valeur constitutionnelle » (jurisprudence René Coty), le droit au logement n’est pas inscrit dans la constitution. On le trouve bien dans la loi (Loi Besson, 1990) mais il ne peut pas être invoqué devant un tribunal par des mal-logés pour obtenir un logement. C’est pour rendre ce droit effectif que nous proposons l’instauration d’un droit au logement opposable. Il s’agit d’un droit individuel qui pourrait être revendiqué par une personne civile devant un tribunal. C’est un instrument juridique permettant au juge d’obliger l’institution responsable de reloger les mal-logés.
C’est une revendication réaliste et une entrée concrète pour régler la crise du logement : la mise en place d’un droit au logement opposable suppose en effet la mise en place de politiques publiques volontaristes permettant de loger tout le monde. A partir du moment où un juge peut ordonner à une institution de reloger une famille, celle-ci doit donc avoir des moyens de relogement, et donc disposer de logements sociaux abordables. La mise en place d’un tel droit implique ainsi une politique de production massive de logements sociaux. Elle aurait également des effets sur l’ensemble des problèmes liés au logement, comme par exemple les expulsions, quel qu’en soit le motif  (impayés, congés vente ou reprise, occupation sans titre, etc.). En effet, la création d’un droit au logement opposable oblige les politiques publiques à privilégier le relogement plutôt que l’expulsion. On peut même envisager que la création d’un tel droit entraîne l’interdiction des expulsions. Autre question à laquelle le droit au logement opposable apporte une réponse, celle des marchands de sommeil. Les marchands de sommeil ne prospèrent, en tant de crise, que parce qu’ils disposent d’un public captif, celui des ménages les plus modestes qui ne peuvent accéder à un logement décent ni sur le marché privé en raison des loyers trop chers, ni sur le marché social en raison de la pénurie. Si le droit au logement devient opposable, les locataires sortent de fait de ce marché captif.
Nous pouvons nous inspirer de l’exemple de l’Ecosse, qui a mis en place le droit au logement opposable, par le vote du Housing Act de 2003. Le gouvernement écossais a décidé de procéder de manière progressive, en commençant par le relogement des publics considérés comme prioritaires (jeunes sans-logis, sortant de prison, mères célibataires, malades, etc.), en élargissant petit à petit la liste de ces priorités. L’ensemble des prioritaires devrait être relogé d’ici à 2012, date à laquelle le droit au logement deviendra opposable pour tous. Le vote de principe s’est donc accompagné d’un plan de relogement détaillé, de moyens financiers très importants et de la refonte du système du logement. Les premiers bilans sont positifs : près de 20 000 familles ont déjà été logées, sur un total de 5 millions d’habitants.
Des questions demeurent évidemment pour adapter l’exemple écossais à la situation française : par exemple, quelle serait l’instance chargée du relogement ? Le système écossais ne dispose que de deux niveaux de décisions  (national et local), alors qu’en France, les échelons de pouvoir sont beaucoup plus nombreux (communes, communautés de communes, départements, régions, Etat). Les responsabilités y sont très diluées, non seulement entre ces acteurs publics, mais également entre les acteurs publics et les bailleurs. La mise en place du droit au logement opposable, et donc le choix d’une instance compétente, impliquerait sans doute une simplification de notre système et édicterait de nouvelles règles. Nous mettons en garde contre les effets d’annonce trompeurs et les stratégies d’affichage : par exemple, dans la loi Engagement National pour le Logement (2006), un article autorise les maires à expérimenter le droit au logement opposable s’ils le souhaitent. Mais quel maire, isolé et sans moyens particuliers, prendra seul cette responsabilité ?
La création d’un droit au logement opposable ne peut pas être une mesure isolée, elle ne peut et ne doit être qu’un point d’entrée pour une refonte générale de la politique du logement [1].
Au Logement Droit*

[1] Cette proposition est soutenue par le Collectif pour un droit Au logement opposable qui regroupe une cinquantaine d’organisations, dont le DAL, ATD-Quart Monde, la LDH, le Secours Catholique, le Gisti, etc.


Réaction(s) à cet article
1 proposition de loi pour un "droit au logement opposable" par Georges Debrégeas
le lundi 08 janvier 2007 à 11:11
Suite au mouvement lancé par les enfants de Don Quichotte, le gouvernement a annoncé le vote prochain d'une loi sur le droit au logement opposable. Hélas, comme on pouvait s'y attendre, le projet de loi ne s'accompagne pas d'une refonte générale de la politique du logement et des moyens permettant de rendre ce droit effectif, comme le réclame ce... [ lire la suite ]