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Les réactions à "Lieux autogérés"par Alice Le Roy et Laurence Baudelet

4 Les Tanneries en danger !! par jack
le dimanche 25 mars 2007 à 17:05
Je vous avais fait part dans une réaction précédente de la grande précarité dans laquelle les lieux autogérés se trouvaient. L'un des endroits cités dans le texte d'alice Le Roy et de laurence Baudelet, en l'occurrence l'espace autogéré des Tanneries à Dijon, est en voie d'expulsion au profit d'un méga-pôle médical privé généreusement soutenu par la mairie PS. Le texte qui suit a pour but d'expliquer notre situation à toute celles et ceux qui n'auraient encore pas entendu parler de cet endroit et des expériences que nous y pratiquons.

**** LES TANNERIES NE SE LAISSERONT PAS EXPULSER ! ****

## Après 10 ans d'existence, l'espace autogéré est menacé par le méga pôle médical privé décidé en secret par la Mairie de Dijon ##

Sans consultation publique et dans la discrètion qui caractérise la période électorale sur les dossiers chauds, la mairie PS de Dijon prend des décisions qui pourraient mener à la fin de l'Espace Autogéré des Tanneries, lieu autonome d'activités culturelles, sociales et politiques
ouvert en 1997. Mais nous n'entendons pas les laisser faire !
Suite à cinq ans de luttes contre l'expulsion et quelques années de status quo, nous annonçons donc aujourd'hui la reprise officielle des actions et manifestations en soutien aux Tanneries.
Nous savions dès le départ que malgré la convention d'occupation gratuite obtenue en 2002, il nous faudrait garder une vigilance permanente. Après diverses rumeurs un peu plus insistantes que d'habitude sur des projets nous menaçant, nous avons contacté la Mairie début mars pour connaître la vérité. Malgré des demandes répétées par
téléphone et par courrier, nous n'avons reçu aucune réponse. Il y a deux jours, nous avons pourtant su de source sûre, mais encore officieuse, que les services concernés de la municipalité avaient fait une proposition par écrit à la Générale de Santé. Ceci en vue d'octroyer à celle-ci l'ensemble de terrains dont nous occuppons une parcelle afin
qu'elle y construise son méga-pôle de clinique privée de dix hectares pour 2009.
Alors que les services publics de santé sont mis en péril par les stratégies néo-libérales de privatisation en vigueur en Europe, la mairie de Dijon favorise-t-elle à son tour l'instauration d'une médecine à deux vitesses ? Veut-elle contribuer aux stratégies de monopole et de conquête de la plus grosse multinationale européenne de santé privée (1,741 milliards d'euros de chiffre d'affaire en 2006, contrôlé par des fonds de pension et à 10% par Vivendi) en lui offrant un terrain public proche du centre-ville et en quasi vis à vis de l'hôpital public ? La Générale de Santé préfère ainsi profiter de l'aubaine municipale pour fermer ses cliniques de proximité plutôt que de les remettre aux normes.
Malgré sa propagande pour la dite « démocratie participative », la Mairie n'a consulté ni nous ni aucune autre personne du quartier avant de conclure des tractations qui non seulement menacent notre espace mais décident aussi de l'avenir d'un morceau de la ville.

## Pourquoi soutenir les Tanneries haut et fort... ##

La politique de la ville met déjà en danger le cinéma indépendant Eldorado et l'espace d'activité squatté « le Toboggan ». Si elle planifie avec ce projet la disparition des Tanneries, elle s'engage ainsi avec le Parti Socialiste, aux yeux de tous, dans le sens d'une France sécuritaire, aseptisée et privée de ses lieux de
résistance,d'expérimentation et de culture populaire.

En effet, les Tanneries, c'est une salle de spectacle, un collectif d'habitation, un espace d'informatique populaire, de développement des logiciels libres et de maintenance de serveurs indépendants, une zone de gratuité, un espace mécanique et vélo, des locaux de répétition et de
sérigraphie, une salle de réunion, un potager, un centre de diffusion et de création de presse alternative, un centre d'aide juridique et pratique aux occupants sans droits ni titre, une bibliothèque, des chantiers d'auto-construction écologique, des dizaines d'associations/collectifs/réseaux locaux et internationaux qui viennent y organiser des soirées, actions, ateliers et échanges de savoirs, des
réunions et des projets....

Là où les lieux culturels publics tournent avec d'énormes subventions et les privés à base de commerce et de sponsors, il y a aux Tanneries des centaines de personnes qui chaque semaine viennent faire vivre une culture indépendante et participer à des activités accesibles gratuitement ou sur la base de participations aux frais. Pour garantir
sa liberté, le lieu a toujours fonctionné sans subventions, ni salarié-e-s.

Dans un pays où les structures autogérées sont quasi systématiquement réprimées et donc précaires, les Tanneries est un des trop rares exemples de projet qui ait pu s'inscrire dans le long terme. Il est, à ce titre devenu un espace ressource et un maillon important d'une scène
culturelle et militante autonome en Europe.

Les Tanneries portent la mise en pratique d'une vision sociale et les outil pour se confronter à ses idées. Nous cherchons à éclater les barrières entre la « vie personnelle » et le « monde politique », à nous
organiser sur des bases formelles horizontales plutôt qu'autoritaires et pyramidales. Nous voulons construire nous-même et changer nos vies, ici et maintenant, plutôt que d'attendre le grand soir. Nous remettons en cause les logiques marchandes et l'accumulation de bien pour prôner la
propriété d'usage et les échanges solidaires. Nous croyons toujours qu'il est possible d'oeuvrer en direction d'une société qui ne soit pas fondée comme elle l'est actuellement sur les rapports de profits et de domination, sur le racisme, le sexisme et l'homophobie.

Les Tanneries ne se vivent pas comme une gentille alternative parallèle qui se construirait en ne bousculant pas trop les pouvoirs en place : un zoo folklorique censé faire la preuve de la bienveillance démocratique
de nos dirigeants. Si nous sommes là, c'est pour faire évoluer la société et lutter !

Les Tanneries ne se fantasment pas comme « en dehors » de cette société mais comme un processus qui se construit à tâtons sans prêt-à-porter idéologique... Mais à contrario de la norme cynique du monde politico-médiatique, nous ne cesserons pas de nous battre pour prouver qu'il est possible de remettre en cause la logique capitaliste. Nous désirerons toujours plus que les beaux discours électoraux de changement qui n'essaiment que du vent. Avec le temps, les Tanneries ont, à ce titre, apporté la preuve précieuse qu'il était non-seulement réaliste mais pertinent de s'auto-organiser sans les institutions, qu'il ne s'agissait pas d'une utopie délirante de jeunes idéalistes destinés plus tard à retourner leur veste.

Les Tanneries, comme tous ces lieux construits envers les normes les environnant, constituent un espace unique, fruit des rêves, des complicités, des rencontres, de la combativité de tant de gens. Son histoire est celle de plusieurs générations, ses murs en reflètent les
joies et les colères, les rages et les passions, les aventures et les émotions...

## Notre projet ne peut être déplacé ni dépecé. Il doit demeurer dans le quartier... ##

Quel que soit le projet d'aménagement du quartier, nous lutterons pour qu'y demeure ce que nous avons construit ici pendant dix ans : nos bâtiments et notre projet dans sa globalité. Ce n'est pas sorcier, vu la taille de l'espace disponible. Il est évident qu'avec une volonté politique en ce sens, des solutions techniques adéquates seront
trouvées.

C'est grâce au soutien populaire et à une succession de pressions et d'actions de rue diversifiées pendant cinq ans, que les Tanneries ont acquis leur maintien dans les lieux. Quatre ans plus tard, nous sommes tout prêt à recommencer à défendre cet espace et à reconstruire un mouvement de résistance fortifié par tous les contacts, expériences et
complicités acquises avec le temps. Les Tanneries, bien que solidement implantées localement, sont aussi portées par une large communauté, dont les affinités n'ont que faire des frontières, qui peut se mobiliser tant par des actions de soutien à travers le monde que par une convergence
pour défendre physiquement le lieu contre l'expulsion. Espérons que résonneront à temps dans la tête des dirigeants dijonnais, les longues journées et nuits de manifestations radicales qui ont immobilisé il y a quelques semaines la capitale danoise et les multiples offensives à travers l'europe en faveur de nos ami-e-s d'Ungdomshuset. Au même titre qu'eux, notre lutte est une lutte globale pour que demeurent et se multiplient des espaces autogérés et des foyers de subversion en Europe.

Nous gagnerons avec toutes les petites et grandes initiatives de protestation de chacun-e d'entre vous. Nous encourageons tout type d'actions de solidarité. A minima, vous pouvez dès maintenant écrire à la Mairie de dijon pour lui exprimer votre volonté que les Tanneries perdurent là où elles sont. Si vous voulez être prévenus d'actions et de
manifs de soutiens concernant les tanneries, envoyez votre mail ou numéro de portable à tanneries@squat.net

LA MEMOIRE DE MME AUBRAC RESTERA EN NOUS!

Dijon, le 24 mars 2007

ON RESTERA... PARCE QU'ON A LA RAGE !

Espace autogéré des Tanneries 17 bvd. de Chicago – 21 000 Dijon - 03 80
66 64 81 - www.squat.net/tanneries

vs

Mairie de Dijon ― à l'attention de M. le Maire François Rebsamen ― 21000
Dijon Standard - 03 80 74 51 51 / francois-rebsamen@ville-dijon.fr
3 une sceptique devenue adepte par Virginie Guiraudon
le mercredi 14 mars 2007 à 20:08
Bravo pour le chapitre très bien ficelé et très intéressant. Je me souviens d'avoir été très sceptique sur les jardins partagés. Trop peu pour changer le monde, trop bobo comme truc, trop ci, trop çà. Moralité, c'est la meilleure chose que notre association de quartier ait faite! Cela n'a pas été sans mal mais quitte à se donner du mal le résultat en termes d'implications des habitants est beaucoup plus probant que d'autres initiatives: plus de diversité sociale en termes d'âge, de revenus, etc... cela nous fera voter aux municipales (à défaut de nous mobiliser pour les présidentielles!)
2 Lieux autogérés par jack
le mercredi 07 mars 2007 à 15:03
C'est avec une attention toute particulière que j'ai lu l'article sur la promotion et le soutien des lieux autogérés de Laurence BAUDELET et d'Alice LE ROY ainsi que la contribution audiovisuelle de cette dernière sur le site. Je me félicite que ce type de propositions soit mis en avant puisqu'il concerne un nombre non négligeable de personnes qui sont passés par ces lieux. J'en suis un témoin direct puisque j'ai été avec des ami(e)s à l'origine de ''l'ouverture'' des TANNERIES à DIJON et que parallèlement tout au long de la décennie 90 j'ai joué dans un groupe de musique alternatif, ce qui m'a permis de connaître les différents lieux autogérés et squats de France, de Suisse, de Belgique et d'ailleurs. Au cours de cette terrible décennie des années 80 pendant laquelle sous couvert d'une ''gauche'' au pouvoir et de la dictature de la culture comme remède miracle et paravent afin de dissimuler la politique néo-libérale, une grande partie de la jeunesse en mal de véritable questionnements politiques a pris son destin en main avec le slogan autogestionnaire du D(o)-I(t)-Y(ourself). Des lieux autogérés fleurirent dans toutes l'Europe. Cette manière de fonctionner à pris de cours le pouvoir et tout cela nous a permis de conduire et de mettre réellement en pratique une autre façon de vivre et de fonctionner. Nombre de jeunes se sont formés dans ces lieux aux questions qui n'émergeaient pas dans le débat public et qui furent de véritables écoles des ''sciences'' humaines: racisme, sexisme, extrême droite, végétarisme, homophobie, autonomie, écologie, relation au travail, rapports marchands, éducation populaire etc, autant de luttes émancipatrices qui ont radicalement changé le cours de certaines vies. Or les résultats en termes de visibilité, de cohérence de ces pratiques, d'implication sans cesse croissante d'un nombre toujours plus important d'acteurs(trices) d'une partie de leur propre existence a amené les pouvoirs publics a une répression terrible de tous ces lieux de vie et, signe qu'il s'agissait d'une véritable volonté politique, cette répression s'est effectuée à l'échelle européenne où les différentes polices étaient coordonnées. France, Pays-bas, Suisse, Belgique, Allemagne, Italie, Espagne et j'en passe. 95% de ces lieux collectifs ont été fermés ou expulsés. Le dernier exemple en date, le Ungdomshuset, la maison de jeunesse de Copenhague. Alors la question se pose : légiférer pour promouvoir ces lieux de vies? Je crois que la réponse a déjà été donnée. Il faut cependant distinguer deux initiatives : celle dont on pourrait prendre comme exemple les jardins partagés et les lieux d'habitation plus communément appelé squats. La première a des chances je pense de se développer avec l'accord des différentes autorités dans ce sens où le délitement des liens sociaux dans les quartiers, au sens de regroupement d'habitations, est tel que de telles initiatives contribueraient à recréer à moindre frais pour les politiques une solidarité ''palliative''. Tout dépendra du degré de contestation du système et de sa corrélation avec les entreprises initiées. Pour ce qui concerne les lieux habités, ou squats, aucun gouvernement ne peut raisonnablement tolérer des pratiques qui remettent fondamentalement en cause la légitimité de leurs dogmes sociaux et économiques. Ces lieux ne leur rapportent rien en termes productifs, leurs activités ne sont pas monnayables et donc rentables, si ce n'est pour ceux qui y participent et dont le savoir d'un seul est celui de tous. Qui plus est l'auto-développement du savoir et de la connaissance en dehors de son cadre réglementé, des sortes d'universités populaires mettant en pratique une culture contestant celle de l'ordre établi ne peut en aucun cas être toléré par les gouvernements. Il s'agit en gros d'un combat pour une ré-appropriation des ''sciences'' humaines avec praxis à la clé et lorsque l'on voit que ce combat dans un cadre légal comme l'université pose déjà de grandes difficultés (voir les contributions de Christian LAVAL et Frédéric NEYRAT pour l'Autre Campagne), alors pour des lieux autogérés... La gratuité, le non marchand, l'anti-utilitarisme, la participation effective, le partage, la culture comme pratiques et comme modes créatifs d'épanouissement sont des valeurs anticapitalistes qui ne peuvent être tolérées par les garants de la bible productiviste et marchande. La où il n'y a aucun intérêt à faire croître le sacro-saint P.I.B et ou pire, de jeunes gens qualifiés de marginaux, délinquants, irresponsables, sales sur eux, hirsutes et j'en passe veulent expérimenter une autre façon de vivre , il n'y a aucune chance raisonnable que ces lieux soient laissés à leurs expérimentateurs. Car les gens au pouvoir, quels qu'ils soient savent que le plus petit degré d'autonomie peut conduire à des apprentissages de la liberté qui tôt ou tard se retourneront contre eux. Le savoir est dangereux quand il n'est pas contrôlé! Donc la pression sur ces lieux continuera de plus belle. Les Tanneries feront probablement bientôt l'objet d'une vente-expulsion et tout sera remis en cause. J'en profite à ce sujet afin de dire que dans le texte de nos deux auteurs, dans le livre pour une Autre Campagne, que certains des lieux qu'elles citaient ont déjà été expulsés. La tactique est simple: à force de harcèlement ils nous obligent à passer le plus clair de notre temps à anticiper leurs coups bas. A force les gens s'épuisent et l'on vient de cette manière à bout après des années de luttes d'expériences alternatives absolument vitales et insérées dans la ville comme celles de la Croix-Rousse à Lyon. Le combat à mener passe de plus en plus par les zones d'autonomie temporaires puisque les lieus fixes et stables nous font cruellement défaut. Cependant le seul fait que vous exposiez ces alternatives dans le débat public me semble réellement important et qu'elles inciteront des individus à se rendre ou à créer des lieux où l'on pratique la théorie et où la vie prend un sens citoyen. Un autre mode de vie est possible hic et nunc!
Lien de l'association MALOKA qui s'occupe des tanneries :
http://squat.net/tanneries/

1 depuis le temps qu'on attendait cela par ait-ali
le mardi 13 février 2007 à 18:06
juste un petit message pour vous feliciter et vous encourager dans cette voie de faire sortir de l'orniere les pratiques auto-gestionnaires auxquelles nous participons depuis plusieurs annees...cela fait du bien en ces temps de campagne deprimante que je suis depuis le fin fond de l'OHIO ou je suis exile pour plusieurs mois.L'ensemble de l'initiative de l'autre campagne me parait plus que salutaire,encore merci tout simplement.