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Les réactions à "La démocratie sexuelle en campagne"par Eric Fassin

1 Travail des femmes et famille par Nicole Gadrey
le mardi 27 février 2007 à 14:02
La question des inégalités entre hommes et femmes ne trouve pas vraiment sa place dans les 80 propositions. Du côté des politiques familiales, la question de leur impact sur le travail des femmes n’est pas abordée. Du côté de la lutte contre les discriminations, le chapitre est centré sur les questions d’origine « ethnique ». La question essentielle du travail à temps partiel n’est pas posée.

Le travail à temps partiel prend au moins deux formes : celle du travail à temps réduit à l’initiative des salariés, celle de l’emploi à temps partiel à l’initiative de l’employeur, mode de gestion flexible des emplois. C’est cette forme de temps partiel qui s’est fortement développée dans les vingt-cinq dernières années. Elle conduit à des situations de sous emploi pour les femmes et les enferme dans la catégorie des bas salaires.
Les horaires atypiques compliquent l’organisation de la garde et de l’accompagnement des jeunes enfants et désorganisent souvent la vie familiale.
Le développement du temps partiel a pesé lourdement sur les salaires. La part des bas salaires a nettement progressé en France depuis vingt ans. Entre 1983 et 2001, la proportion de salariés touchant de bas salaires (moins de 838 euros par mois en 2001) est passée de 11 % à 17 %. Les emplois à temps partiel ont largement contribué à la montée de la précarité et de la pauvreté pour les femmes. Les trois quarts des emplois à bas salaires sont des emplois à temps partiel. La faiblesse des salaires à temps partiel et l’instabilité des revenus mensuels sont des facteurs essentiels du développement de la précarité des femmes. Le salaire féminin est encore trop souvent considéré comme un salaire d’appoint.
La loi de 1981, qui régit les droits et devoirs des salariés et des employeurs en matière de temps partiel, a largement favorisé le développement du temps partiel subi, au détriment du libre choix des femmes et d’une articulation satisfaisante entre vie professionnelle et vie familiale.

Dans le cadre d’un travail sur « Femmes et précarité » dans la région Nord Pas de Calais, nous avons recueilli de nombreux témoignages de femmes qui montrent que le temps partiel subi, payé au SMIC, est une situation qui n’assure ni l’indépendance, ni la dignité des femmes, et où elles se trouvent de plus en plus souvent enfermées, avec comme seule alternative les minima sociaux qui leur assurent un niveau de vie égal ou parfois supérieur, mais ne correspondent évidemment pas à leurs aspirations.


Une proposition est donc indispensable pour assurer l’égalité entre hommes et femmes et sortir ces dernières de la précarité : revoir en profondeur les dispositions législatives qui régissent la création d’emplois à temps partiel à l’initiative de l’employeur, et en particulier la loi de 1981 qui a créé cette possibilité.

Nicole Gadrey, sociologue