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Les réactions à "Pour un enseignement des sciences sociales et humaines dès l’école primaire"par Bernard Lahire 8 Réponse de l'auteur Réactions aux réactions par Bernard LAHIRE le samedi 17 mars 2007 à 15:03 Je remercie celles et ceux qui ont pris la peine de donner leur avis sur mon texte. Pour l'essentiel des critiques, je ne suis pas vraiment surpris et tout lecteur du texte initial d'où est tirée cette proposition ("Chapitre 14 : Vers une utopie réaliste : enseigner les sciences du monde social dès l'école primaire" in L'Esprit sociologique) pourra constater que je réponds, par anticipation, à toutes les objections formulées.
Tout d'abord, je rappelle que personne ne s'étonne que l'on puisse enseigner la grammaire dès le CE1 (à l'âge de 7 ans) alors que les enfants ne savent pas tous, loin de là, ni "bien" écrire ni "bien" parler. La grammaire, les mathématiques, l'histoire, la géographie, les sciences sont des savoirs savants qui ont été transposés pour être enseignables par l'école. Faudrait-il attendre que les éléves parlent et écrivent "bien" pour commencer à leur permettre de constituer un rapport réflexif à la langue ? Certainement pas. Alors pourquoi attendre que s'installent des représentations fausses du monde social avant de commencer à leur transmettre un rapport plus distancié à cette réalité ? Si je comprends bien l'une des remarques qu'on me fait, il faudrait même arrêter immédiatement d'apprendre autre chose que la lecture, l'écriture et le calcul tant que les "bases" ne sont pas solides. Mais c'est faire comme si on n'apprenait pas à parler, écrire, lire, compter, etc., dans les autres "matières"... Ensuite, ma proposition est une proposition de réorganisation de l'enseignement actuel. Certaines réactions à mon texte font comme si on n'enseignait pas du tout les sciences humaines à l'école primaire aujourd'hui. Or, je rappelle que l'histoire et la géographie sont enseignées actuellement sans que cela ne pose un problème particulier. C'est vers un enseignement global d'un certain nombre d'acquis des sciences humaines et sociales que je suggère d'aller : histoire, géographie, anthropologie, sociologie... Cela ne s'ajouterait donc pas à l'existant mais supposerait une réorganisation de l'existant. Ce qui me stupéfait le plus, c'est l'argument du corporatisme. Quand un sociologue propose que les sciences humaines et sociales soient présentes dès l'école primaire (pas que la sociologie!), il est forcément corporatiste. En revanche, enseigner les sciences, les mathématiques, etc., ce serait sans doute faire preuve d'universalisme. Il faut juste prendre un peu de recul et se demander s'il est utile ou non, pour la formation d'un citoyen éclairé, critique, conscient dans une démocratie moderne, de le doter d'une conscience réflexive et d'outils (souvent très simples) pour comprendre le monde social. Il faut prendre acte que nous vivons dans une société où les manipulations symboliques et les mensonges sociaux sont omniprésents et doter les citoyens, dès leur plus jeune âge, des moyens de résister à tout cela. Cela me semble fondamental. 7 encore moins d'heures pour apprendre les fondamentaux par gaston D le dimanche 11 mars 2007 à 19:07 Tout cela c'est très bien, sauf qu'on a des bataillons d'enfants qui sortent aujourd'hui de l'école primaire sans être capable de lire un texte simple, d'écrire trois phrases qui se tiennent, de faire une division ou une multiplication, bref sans avoir acquis les fondamentaux. Alors on peut toujours rèver de leur faire faire plein d'autres choses (chacun défendra sa chapelle). Mais est-il vraiment raisonnable d'imaginer aborder, c'est-à-dire y consacrer des heures d'enseignement, des sciences humaines (ou tout autre matière tout aussi importante) avec des gamins qui ne savent même pas lire !?
6 enseignement des sciences sociales et humaines par Bonneville le dimanche 11 mars 2007 à 17:05 Bonjour,
e réagis à cet article intéressant. En tant qu'enseignante je dirais qu'il est nécessaire d'enseigner les sciences sociales à l'école. Cependant, cet enseignement doit passer par une restructuration du système scolaire c'est à dire des programmes. Ensuite, à quel moment doit-on l'enseigner ? rappelez-vous que l'enfant et l'ado se sont des personnes qui sont en construction pour devenir des adultes. Ils ne possèdent pas encore tous les repères ou éléments pour conduire une pensée logique et abstraite. La maturation cérébrale, la transformation du corps et l'apprentissage sont les préalables. Donc en primaire, c'est trop tôt. Cependant dans le secondaire, à partir de la 3è, ce serait une ouverture pour faire réfléchir sur les réalités sociales et non pas commencer à les subir; pour apprendre à les connaitre. Le sanitaire et sociale serait une discipline comme l'histoire géographie ou le français. Il ne faudrait pas que l'enseignement du sanitaire et sociale soit biaisé par l'apprentissage de certains courants uniquement recommandés par le ministère de lasanté mais que tous les auteurs puissent être reconnus. a+ MC 5 Incompréhension par Stephane le vendredi 02 mars 2007 à 17:05 Un sociologue vient nous dire que la sociologie est indispensable. Les litteraires classiques affirment que le grec et le latin sont la base de la compréhesion. Les mathématiciens ne voient pas de salut sans les mathématiques.
Chacun défend sa paroisse dans l'espoir que l'énorme rouleau compresseur qu'est l'éducation nationale l'épargnera, et que SA matière continuera d'être. Est-ce une plaisanterie ? J'attends savec impatience que les juristes viennent expliquer que le droit doit être enseigné au primaire au vu de notre société de plus en plus légaliste. 4 Les sciences sociales dès le primaire? Chiche! par Levron Pierre le lundi 29 janvier 2007 à 14:02 Je viens de lire l'article de monsieur Lahire et...bon sang de bon sang, qu'est-ce que j'ai été content! Les sciences sociales souffrent, en France, de n'être abordées que dans le supérieur (et encore: au cours de mes études de lettres, je n'y ai été sensibilisé qu'au moment de ma maîtrise!)Par-delà l'intérêt civique que revêtirait une éducation à ces savoirs, je songe au bénéfice pédagogique que tous en retireraient. Je m'occupe en ce moment d'un jeune homme qui se prépare à passer le bac; je lui fais travailler la philosophie, et je constate à chaque séance les difficultés qu'il rencontre. S'il est compliqué de conceptualiser, ce ne l'est pas plus que de faire des mathématiques! La fameuse "barrière" de la terminale pour l'enseignement de la philo (à laquelle je ne crois pas; s'il faut être mûr pour philosopher, il faut l'être également pour faire des maths, autre discipline conceptuelle)n'en tomberait que plus vite en suivant les recommandations de monsieur Lahire et ce n'en serait que mieux! Si j'ai vraiment été content en voyant qu'il allait bien plus loin que ce que je pensais moi comme révolutionnaire, je me pose toutefois une question: les enseignants concernés (professeurs des écoles, des collèges et des lycées)sont-ils prêts (collectivement)à enseigner des disciplines qui ne sont pas de l'histoire, de la géographie, de l'éducation civique...ou de la philosophie? 3 Réflexions sur votre proposition par Mathieu le samedi 13 janvier 2007 à 11:11 Bonjour,
Je suis psychologue scolaire et j'ai bien entendu enseigné à l'école primaire. Je suis très heureuse d'avoir lu votre article car j'ai eu l'occasion de constater, moi aussi, à quel point les élèves ont du mal à analyser les faits sociaux. (Le journal télévisé qu'ils regardent parfois étant l'antithèse même d'une réflexion distanciée et ne la permettant jamais vue la rapidité du déroulement des sujets qui y sont évoqués). Trois difficultés dès l'abord : le manque crucial de formation des enseignants. Enseigner les faits sociaux demande une réflexion préalable sur le sujet qui n'est pas enseignée à l'IUFM. Concevoir des séquences sur le sujet en les couplant, comme vous le proposez avec des objectifs déjà inscrits aux programmes demande un travail très important de recherche de documents et de réflexion-distanciation de la part de l'enseignant. Enfin, le fait social est politique est il est certainement très difficile de l'enseigner en restant dans la neutralité que doivent respecter les professeurs d'école pour que le contrat lié à l'obligation scolaire ne soit pas dénoncé. En dehors de ces réserves, je pense que l'enseignement des sciences sociales et humaines à l'école primaire est un enjeux très important d'éducation populaire qui permettrait de donner aux enfants une plus grande lucidité face au monde que nous leur construisons. Carine Mathieu 2 question pratique par franck le jeudi 11 janvier 2007 à 19:07 Certes, les enfants à l'école primaire ont du mal à prendre de la distance, certes ils ont besoin de repères, tout comme ils ont - à mon avis - besoin de croire au père noël, à un moment de leur vie. Pourtant, il me semble utile de leur donner dans le même temps des outils, des habitudes de penser, de regarder le monde qui leur permettront, lorsqu'ils en ressentiront le besoin, de se défaire de leurs croyances, de prendre de la distance par rapport à ce qu'ils entendent dans leurs familles ou voient sur l'écran.
Et puis adopter une posture scientifique par rapport au phénomènes sociaux ne me paraît pas contradictoire avec la construction des repères, ni même avec la construction de l'individu. Prendre de la distance est une action relative à ce que l'on voit, à ce que l'on perçoit et il me semble évident que l'on ne peut attendre d'enfants du primaire des études semblables à celles d'un étudiant en socio. A leur niveau, ils sont tout à fait capables de remettre en cause des a priori et le recours à des méthodes scientifiques plutôt qu'à des arguments moraux mille fois entendus me paraît une meilleure garantie de solidité dans la construction de ces fameux repères. Bref l'idée d'utiliser les enquêtes sur des aspects de leur vie m'intéresse grandement mais j'ai du mal à voir concrètement comment et sur quels sujets l'appliquer. Y a-t-il des auteurs, des livres auxquels je puisse me référer afin d'y voir plus clair? 1 Quelques remarques par colombani le mardi 09 janvier 2007 à 15:03 "Pourquoi ne pas enseigner les outils et les manières de penser que les sciences sociales et humaines ont constitués efficacement depuis plus de cent ans plutôt que de laisser les futurs citoyens construire leurs représentations du monde social au sein de leurs structures familiales ou dans les cadres traditionnels de la socialisation (enseignement religieux, socialisation politique et syndicale, etc.) ?"
Je pense plutôt que s'il y a bien un âge qui n'est pas fait pour la distanciation telle qu'elle est décrite dans ce texte, c'est celui de l'enfance. Ne serait-il pas plus raisonnable de penser qu'il y a un temps pour tout ? Vous surestimez les capacités d'abstractions d'êtres qui ont surtout besoin de repères. Pourquoi voulez-vous leur donner les outils pour s'en affranchir alors même qu'ils ne les ont pas assimilés ? C'est aux parents, aux enseignants, aux bibliothécaires de les protéger contre les agressions du système. Je vous propose de méditer cette phrase : "la bibliothèque est un espace public qui lutte, à sa manière contre la domination du marché". Cette phrase de François de Singly (citée dans le livre "Le métier de bibliothécaire" aux éditions du Cercle de la librairie) illustre selon moi l'importance capitale des bibliothèques où l'enfant, doté de sa carte de lecteur, fait librement ses choix, avec l'aide de professionnels du livre qui lui apprendront les outils pour chercher ses informations. Ne voyez-vous pas le chemin idéal qui conduit de la carte de lecteur à la carte d'électeur ? Pour moi, ce chemin est évident. Ecole et bibliothèque traitées à importance égale, voilà ma conviction. Cordialement |
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